2007
Deux bateaux
de skippers
propriétaires, partis des côtes méditerranéennes françaises ont rejoint
les cinq bateaux loués à Procida, petite île près de Naples. Ce fut une
splendide
navigation pour tous vers les îles volcaniques Eoliennes après un
passage au large de Capri et, pour certains, un petit saut jusqu’en
Sicile.
Un bateau est parti d'Antibes également pour les
îles Eoliennes, mais a finalement changé de destination, comme nous le
raconte maintenant un des équipiers:
Barrer n'est
pas facile ...
L'équipage était constitué de vétérans et d'autres équipiers qui
découvraient la plaisance. Le baromètre et l'ambiance étaient au beau
fixe. Aussitôt les
courses
faites et le bateau pris en
main, nous étions partis d'Antibes pour une petite étape d'amarinage le
long de la côte méditerranéenne. Après cette étape qui s'était révélée
utile et qui avait permis à certains estomacs de nourrir les poissons,
nous étions fin prêts. Nous quittâmes le continent pour la Corse,
poussés par une aimable brise. Même
ceux qui connaissaient déjà l'Ile de beauté avaient, comme le reste de
l'équipage,
apprécié l'arrivée dans le splendide golfe d'Ajaccio.
Le skipper,
Maurice, avait programmé la poursuite du voyage vers les
îles Eoliennes et ce matin-là, nous quittons Porto Pollo pour aller
vers le sud, dans les Bouches de Bonifacio.
Dès le départ,
le vent est plus frais que les jours précédents ; les
novices se posent quelques questions, mais Maurice s'en amuse en
disant qu'il n'y a pas plus de 20 noeuds de vent et que celà ne pose
pas de problème pour un bateau quasi neuf de 45 pieds comme le nôtre,
d'autant plus que nous sommes poussés par le vent. On lève l'ancre et
très vite on se retrouve filant à bonne vitesse au milieu de petites
vagues sympathiques ; le vent force un peu, et notre skipper décide de
rentrer de la toile en roulant légèrement le génois et la grand-voile.
Les équipiers chevronnés, Jean-Luc et André, effectuent la
manoeuvre sous les regards intrigués des autres participants à la
croisière. Je participe également à
cette manoeuvre, car, bien que je ne sois pas débutant, je dois
précisément faire mes preuves lors de cette croisière Soleil-Bleu
qui est pour moi aussi une "première".
On commence à voir la grande tourelle qui marque l'entrée des Bouches ;
le vent forcit, les vagues se creusent nettement et la barre devient
intéressante ; bref, on a un force 6, et chacun veut barrer car ça
change de la promenade sous pétole ! André prend la barre un moment,
puis la passe à Jean-Luc, qui s'efforce de contrôler les embardées du
bateau. Il se cramponne à la barre et chaque fois qu'une vague pousse
le cul du bateau, il tourne la roue dans l'autre sens pour ramener le
bateau dans la bonne direction. Il est important d'avoir un bon timing
car sinon, le bateau est ramené trop tôt et prendra mal la vague
suivante, ou, au contraire, le bateau fera une grosse embardée, se
couchera plus ou moins de côté et prendra en plus la vague suivante de
plein fouet, ce qu'il vaut mieux éviter ! De temps en temps, Jean-Luc
est surpris et on
l'entend ronchonner tranquillement ; il ronchonne de plus en plus
car nous avons largement passé la tourelle et nous sommes vraiment dans
les
Bouches avec des vagues qui sont maintenant bien marquées ; ceux qui
connaissent
la zone distinguent déjà l'entrée de Bonifacio, et comme Maurice
nous informe qu'on y fera escale, on peut donc commencer à discuter de
ce qu'on va
boire à l'arrivée : vin ou bière ?
La discussion
est interrompue par un énorme "CRAC".
Chacun se regarde ; a-t-on touché un OFNI (Objet Flottant Non
Identifié) ? le mât va-t-il tomber ? a-t-on eu une très grosse vague ?
Apparemment rien de tout cela, plutôt le bord rabattant de la table qui
a vraiment tapé fort. On le coince, pendant que Jean-Luc commence à
s'énerver sur ce bateau qui ne veut pas lui obéir : il me demande de
prendre la barre en me souhaitant de faire mieux ! Il y a longtemps que
je n'ai pas utilisé de barre à roue et je me serais volontiers passé
d'une reprise en main dans ces conditions mais je ne peux pas reculer ;
je le regrette d'autant plus que tout de suite le bateau ne veut en
faire qu'à sa tête, il veut absolument aller d'un coté alors que la
bonne direction est de l'autre côté. Je vois le regard ironique de
Jean-Luc et celui interrogateur de
Maurice, qui me rappelle que dans ces conditions, il faut "abattre".
Je ne fais
pourtant que celà en appuyant de tout mon poids sur un des
rayons de la roue mais ce "@§&...." de bateau ne veut toujours rien
savoir. J'ai l'impression qu'il y a un jeu impressionnant ou alors que
je manque vraiment de réflexe ...
Nous empannons
pour nous diriger directement vers le port de Bonifacio
maintenant tout proche. Après quelques minutes,nous passons le phare et
aussitôt,
en quelques mètres, sous la protection des falaises, les vagues se
calment, le vent tombe : nous enroulons les voiles et
continuons au moteur dans la calanque qui mène au port. Le bateau
avance maintenat comme sur un lac, la barre est à nouveau douce, voire
molle.
Maurice me propose de faire la manoeuvre d'accostage mais, lâchement,
je lui redonne la barre en prétextant que je n'avais pas retrouvé mes
marques. Je m'apprête donc à admirer une superbe
manoeuvre de prise de
pontille mais très vite, on s'aperçoit que le bateau est habité par un
troll qui empêche le bateau de tourner dès que Maurice met les gaz et
tourne la barre à roue dans un sens ou dans un autre. Autant dire
que la manoeuvre est approximative et que l'aide du réceptionniste du
port n'est pas inutile ! On est un peu vexés et une fois installés
... on s'interroge du regard et, en un mouvement commun et unanime, on
cherche une explication à ce phénomène en enlevant tout ce qu'on peut
facilement enlever aux
environs du gouvernail : les banquettes et les couvercles de coffre,
les
vaigrages dévissables dans les cabines ; et c'est alors que nous
comprenons la raison de nos maladresses en voyant : .....!
Autant dire
que l'escale à Bonifacio a été
beaucoup plus longue que
prévue. On a pu faire faire une réparation provisoire, mais le temps
perdu
nous a empêché de rejoindre le but initial de notre croisière. On est
donc allé musarder aux Lavezzi, on a découvert les côtes du nord
de la Sardaigne, puis nous sommes retournés
sur le continent en passant par Calvi et les îles de Lérins, et enfin
le
bateau a été rendu au loueur d'Antibes. Celui-ci, en vrai
professionnel,
nous a remboursé tous les frais occasionnés par cette avarie et a
ajouté un geste commercial.
Le retour vers
l'Alsace s'est effectué comme
l'aller, en voiture, par la vallée du Rhône et nous avons retrouvé le
Rhin, au petit matin.
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